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Résumé :
Amine,
chirurgien israélien d'origine palestinienne, a toujours refusé de
prendre parti dans le conflit qui oppose son peuple à son peuple
d'adoption et s'est entièrement consacré à son métier et à sa femme
Sihem. Jusqu'au jour où un attentat se produit à Tel Aviv. Son ami
Naveed, policier, lui annonce alors que Sihem a été tuée et qu'elle est
en plus soupçonnée d'être la kamikaze.
Citations :
" Il faut toujours regarder la mer. C'est un miroir qui ne sait pas nous mentir ".
" Qui rêve trop oublie de vivre ".
" Pour certains, le paradis est au bout de la vie d'un homme ; pour moi, il est au bout de ma main ".
Extraits :
"
Alors que je grandissais sur une terre tourmentée depuis la nuit des
temps, je refusais de considérer le monde comme une arène. Je voyais
bien que les guerres se succédaient aux guerres, les représailles aux
représailles, mais je m'interdisais de les cautionner d'une manière ou
d'une autre. Je ne croyais pas aux prophéties de la discorde et
n'arrivais pas à me faire à l'idée que Dieu puisse inciter ses sujets à
se dresser les uns contres les autres et à amener l'exercice de la foi
à une absurde et effroyable question de rapport de forces. Dès lors, je
m'étais méfié comme d'une teigne de ce qui me réclame un peu de mon
sang pour purifier son âme".
"Je n'avais (jamais) eu le temps de
m'intéresser aux traumatismes qui sapent les appels à la réconciliation
de deux peuples élus qui ont choisi de faire de la terre bénie de Dieu
un champ d'horreur et de colère. Je ne me souviens pas d'avoir applaudi
le combat des uns ou condamné celui des autres, leur trouvant à tous
une attitude déraisonnable et navrante. Jamais je ne me suis senti
impliqué dans le conflit sanglant qui ne fait, en vérité, qu'opposer à
huis-clos les souffre-douleur aux boucs émissaires d'une Histoire
scélérate toujours prête à récidiver."
"Mes oeillères me cachaient
l'essentiel du drame qui ronge mon pays ; (elles) occultaient la teneur
véritable des horreurs en passe de transformer la terre bénie de Dieu
en un inextricable dépotoir où les valeurs fondatrices de l'Humain
croupissent, les tripes à l'air, où les encens sentent mauvais comme
les promesses que l'on résilie, où le fantôme des prophètes se voile la
face à chaque prière qui se perd dans le cliquetis des culasses et les
cris de sommation."
Commentaires :
J'ai
un peu de mal à "digérer" ce style de roman. Il s'agit de "ces choses"
que l'on voit, aux informations télévisées, qui restent pour nous (pour
moi) très lointaines, un genre de fiction... (c'est du moins ce que je
souhaiterais)
Et puis voilà : "l'attentat" nous décrit ce monde dur
et violent qui n'est qu'une trop douloureuse réalité à regarder en
face...
Le commentaire de Faustine Amoré (évène.fr) :
Le sujet n'était pas évident. Pour aborder le thème des kamikazes
israéliens, il fallait au moins l'audace de Yasmina Khadra - Mohammed
Moulessehoul de son vrai nom ; rien à voir, donc, avec la femme qu'on
aurait pu imaginer. L'auteur emmène son lecteur, passionné dès les
premières lignes de ce roman époustouflant, dans les méandres de la
conscience humaine. Et la conscience est ici double. Il y a d'abord
celle d'Amine, cet éminent chirurgien d'origine arabe et naturalisé
israélien, qui tente de comprendre. La question n'a de cesse de revenir
: pourquoi ? Pour quelles raisons sa femme, cet être doux, dénué de
haine et de mystère, s'est-elle fait exploser dans un restaurant, bondé
d'enfants de surcroît ? Pourquoi ne lui a-t-elle rien dit ? Et comment
lui, qui l'aimait tant, qui lui avait donné toute sa vie, n'a-t-il rien
vu venir ? Dans sa quête éperdue pour approcher les raisons qui ont pu
motiver un tel acte, Amine va devoir se frotter à ces hommes et ces
femmes qui n'ont en tête que la cause palestinienne… au péril de leurs
propres vies. Le récit est haletant, mené par une plume brillante et
concise. L'auteur n'a aucun mal à nous tirer des larmes de chagrin et
d'incompréhension, de compassion et de haine. Yasmina Khadra souhaitait
devenir "une plume au service de la littérature, cette sublime charité
humaine." Pari réussi.