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Le bruit des vagues

22 août 2015

dernière lecture : Colère

de Denis Marquet

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4 etoiles


Présentation de l'éditeur :
La peur, l'angoisse et l'incompréhension gagnent peu à peu la population des États-Unis. Sur la côte atlantique, des centaines de personnes meurent noyées sans qu'aucun phénomène sismique n'ait été relevé, d'autres sont dévorées par des dauphins. À Philadelphie, de nombreux habitants sont retrouvés égorgés par leurs propres animaux domestiques. La population de Clydesburg, en Illinois, est anéantie. Par qui, par quoi ? Le département américain de la Défense réunit une cellule de crise autour de scientifiques réputés, mais personne n'est en mesure d'appréhender ces étranges phénomènes. Une chose est sûre : l'avenir de l'humanité est en grand danger. Seule, l'anthropologue Marie Thomas, en mission dans la forêt amazonienne, a compris que les jours de Colère étaient arrivés : les hommes ne peuvent jouer impunément avec la Terre sans en être punis un jour. Dans ce premier roman, Denis Marquet déploie des trésors d'imagination et réalise un récit ésotérique et écologique dans la grande tradition du thriller américain. --Claude Mesplède 
Denis Marquet a 36 ans. Agrégé de philosophie, il a enseigné à l'université et à Sciences-Po avant d'ouvrir un cabinet de philosophie où il donne des consultations et anime des groupes de travail. Colère est son premier roman. 

Mon sentiment au sujet de ce roman :
Ouh là là !!! ...Et, à la fin de chaque chapitre : "Ouh là là !!!".
Terrible suspense, rebondissements étourdissants. Dire que ce livre nous tient en haleine est bien trop étriqué. Ce livre nous propulse dans une aventure avec un A majuscule : celle de l'humanité, mise en péril, et, ce qui fait le plus mal : ce sont des gens comme vous et moi qui sont concernés. Notre quotidien, donc : ce qu'on lit dans les journaux de plus en plus souvent... Notre avenir ?
ça fait franchement peur... : c'est tellement proche de la réalité. De l'évolution de notre société, au mépris de notre belle terre, qui sait être vengeresse, violente, impitoyable. Et qui l'est de plus en plus souvent. Sans doute est-ce cela, le plus effrayant... : ce péril vers lequel nous allons, à une vitesse exponentielle, et dont l'homme est le principal instigateur.
ça existe, ça, des trillers philosophiques ? Parce qu'alors nous voilà plongés (que dire, plongés ? fascinés...) par l'un d'entre eux...

Je n'ai pas pu m'empêcher de repenser à Laurent Gounelle, qui m'avait fait découvrir d'une part Edgar Morin, ce philosophe inquiet de voir les hommes avancer « comme des somnambules vers la catastrophe » et d'autre part Sheldrake qui nous parle du principe de résonance morphique (clic), tous deux décrivant ce même processus, qui pourrait fort bien apporter la disparition de l'Humanité toute entière...

Morceaux choisis :
"Peut-être que quand on ne prend aucun plaisir à quelque chose, c'est qu'on n'est pas fait pour ça (...)"
"Si seulement on pouvait fermer les oreilles comme on ferme les yeux... Et ne plus rien entendre, à volonté, ne plus être attaqué par l'insondable et retentissante connerie du monde".
"Le hasard est le point faible de la plus forte des cuirasses".
"Les yeux se ferment, les regards se détournent. L'homme a reçu ce don merveilleux : ne voir que ce qu'il veut, ne croire que ce qui l'arrange. Oublier."
"Elle avait compris quelque chose : c'était en elle que tout se jouait. La nature n'était hostile que dans la mesure exacte où elle projetait sur elle le chaos dont elle était porteuse".
"Nier la vérité du chamanisme du point de vue scientifique était aussi ridicule que nier la vérité des découvertes scientifiques du point de vue chamanique".
"Qu'est-ce que c'est mourir, pensa-t-elle, quand tout le monde meurt en même temps... Ce qui est terrible, c'est d'être arraché au monde, et que tout continue comme si l'on n'avait aucune importance, comme si le monde n'en avait rien à faire qu'on meure ou qu'on vive..."
"Les chercheurs cherchaient. Ils ne trouvaient rien. Leur métier, c'était de chercher, alors ils cherchaient."
"(...) et la splendeur ocre des rocailles ouvre en moi un espace illimité. Un aigle traverse et disparaît. Un nuage immaculé se promène dans l'air tremblant. Mon regard est avide de formes. Je n'avais jamais réalisé à quel point voir est une nourriture".
"Savoir est le sommeil de l'intelligence. La véritable science, elle, est une aventure. Elle exige que nous soyons capables de ne plus rien savoir, afin de nous ouvrir au mystère du monde. Car le monde est bien plus vaste que notre savoir."
"Ce que l'homme a mis des dizaines de millénaires à édifier, la nature le défait en quelques poignées de jours".
"Une famille... Un lieu où être vu, entendu, accueilli, sans que personne ne pose de conditions."
"Voir est un chemin. Accepter ce qui est, ce qui se donne, ce qui advient. Sans condition. Sans détourner le regard, sans laisser ses yeux fabriquer des mirages pour éloigner ce qui dérange."
"Humain... Cela vient de "humus", la terre. Comme le mot humilité. L'humilité, c'est pour l'homme se souvenir qu'il est fait de terre, et qu'il sera rendu à la terre. S'il l'oublie... la Terre, un jour, le lui rappelle..."

Et mon passage un peu plus long... :
"Toute notre culture est basée sur la peur. Toutes nos énergies sont consacrées à refuser la mort. Et nous ne voyons pas qu'à refuser la mort c'est à la vie que  nous disons non. Car la mort et la vie ne sont qu'une seule et même réalité. Cela, les Indiens le savent.
Nous, les Blancs, qui dominons le monde, avons trop peur de sentir la vie parcourir notre chair, trop peur de savourer notre appartenance à la Terre, parce que c'est aussi garder mémoire qu'il faudra retourner, un jour, à la terre.
L'Indien sait, d'un savoir cellulaire, qu'il n'est pas distinct de la Terre dont il provient et dont il est fait. Avec mes frères, j'ai appris à marcher pieds nus sur la terre brûlante, comme eux je me suis étendu sur la Terre à me laisser bercer par la pulsation profonde de sa vie.
Aimer la vie, me disait Lololma, c'est se souvenir que l'on n'est rien. L'homme blanc préfère se faire croire qu'il est tout. Il est rempli de haine pour la Terre dont il est fait. Il veut la posséder. Il met la Terre en demeure de produire, toujours davantage. Il ne veut aucune limite à sa puissance. Il détruit ce qui lui échappe, il se rend sourd et aveugle à ce qu'il ne peut détruire.
Il ne connaît plus rien du Grand Mystère."


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18 août 2015

la mer

"La mer 
est un espace
de rigueur et de liberté."

Victor Hugo

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Photo août 2015
Côtes d'Armor

20 juillet 2015

où est l'essentiel...

"Demandez au marin s'il peut vivre à terre,
à l'oiseau s'il peut être heureux sans ses ailes
au coeur des hommes s'il peut se passer d'émotions."

Une citation de George Sand

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Créations en pâte polymère

 


Une création récente 
qui ne serait pas encore visible en boutique vous plaît ? 
N'hésitez pas à me contacter 
 

16 juillet 2015

dernière lecture : L'océan au bout du chemin

de Neil Gaiman

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4 etoiles

Présentation de l'éditeur :
"J'aimais les mythes. Ils n'étaient pas des histoires d'adultes et ils n'étaient pas des histoires d'enfants. Ils étaient mieux que cela. Ils étaient, tout simplement." De retour dans la maison de sa famille pour des obsèques, un homme encore jeune, sombre et nostalgique, retrouve les lieux de son passé et des images qu'il croyait oubliées. Le suicide d'un locataire dans une voiture au bout d'un chemin, sa rencontre avec une petite voisine, Lettie, qui affirmait alors que l'étang de derrière la maison était un océan.
Et les souvenirs de l'enfance, qu'il croyait enfuis, affluent alors avec une précision troublante... 
Ce sont les souvenirs d'un enfant pour qui les histoires existent dès qu'on les croit et qui se réfugie dans les livres pour échapper aux adultes, un enfant pour qui les contes sont sa réalité. Gaiman nous plonge ainsi l'univers de l'enfance en même temps que dans celui des contes anglo-saxons, dont il a une connaissance érudite.
Mais plus encore, il nous convie à une relecture de l'influence des contes sur notre enfance, une réflexion sur la mémoire et l'oubli, et ce qui demeure d'enfance en nous. Fidèle à son imaginaire féérique, Neil Gaiman est un créateur d'archétypes que Stephen King qualifie de "trésor d'histoires". Il épure ici sa phrase et ses possibilités narratives pour nous procurer une émotion toute nouvelle, inédite, dans ce roman court, très personnel, qui dévoile sans doute beaucoup de lui et démontre tout le génie littéraire qui lui a valu le convoité Book of the Year décerné à ce roman par les lecteurs anglais.

 

Mon sentiment au sujet de ce roman :
C'est (encore !) un roman auquel je ne m'attendais pas du tout... et qui, je l'avoue, m'a pas mal destabilisée. Une angoisse montait, en même temps qu'un danger tangible rôdait autour de l'enfant, héros de ce roman. Ici, le fantastique côtoie effrontément le monde réel, laissant planer le doute : alors, le monde imaginaire existerait vraiment ?
Neil Gaiman est un auteur talentueux, qui a su me faire passer par moultes émotions, et a laissé ouverte une brêche béante dans mes pensées déjà fort rêveuses sur un monde parallèle, si proche de nous, pour peu que nos pas nous mènent, parfois, au bout de quelque chemin...

 

Morceaux choisis :
"La femme a posé son chiffon sur le buffet. "ça se boit pas, l'eau de mer, hein ? Trop salée. ça serait comme boire le sang de la vie".
"Il y avait plus de sécurité dans les livres qu'avec les gens, de toute façon."
"Personne ressemble vraiment à ce qu'il est réellement à l'intérieur. Ni toi. Ni moi. Les gens sont beaucoup plus compliqués que ça. C'est vrai pour tout le monde."
"J'étais un enfant normal. C'est à dire que j'étais égoïste, que je n'étais pas entièrement convaincu de l'existence de ce qui n'était pas moi, et que j'étais certain, avec une conviction inébranlable, ferme comme le roc, que j'étais l'élément le plus important de la création. Rien n'avait pour moi plus d'importance que moi".
"Rien est jamais pareil, a-t-elle répondu. Que ce soit une seconde, ou cent ans plus tard. ça bouillonne et ça brasse tout le temps. Et les gens changent autant que les océans".
« - Les adultes et les monstres ont peur de rien.
- Oh, si, les monstres ont peur. C'est pour ça que ce sont des monstres.
Quant aux adultes...Vus du dehors, ils sont grands, ils se fichent de tout et ils savent toujours ce qu'ils font. Au-dedans, ils ressemblent à ce qu'ils ont toujours été. A ce qu'ils étaient lorsqu'ils avaient ton âge. La vérité, c'est que les adultes existent pas. »
12 juillet 2015

pensées choisies

"Aie quelques pensées choisies
auxquelles tu t'arrêteras de temps en temps,
comme on s'arrête
devant certains points de vue
qu'on aime".

une citation d'Anne Barratin

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Photo juin 2015
(Le lac de Monteynard)

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10 juillet 2015

pour changer...

"Car, quoi que l'on puisse penser,
rien n'est jamais figé dans la vie."

une citation de Jean-Paul Didierlaurent
dans "Le liseur du 06h27"

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2015-034CollierLeBruitDesVaguesV3

Création polymère

9 juillet 2015

dernière lecture : L'épuisement

de Christian Bobin

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3,5 etoiles

Présentation de l'éditeur :
" Je m'égare un peu, ce livre ressemble de plus en plus à ce que ma mère disait en me voyant sortir, mal coiffé : tu ressembles à l'orage. Ce livre ressemble à l'orage mais, somme toute, une promenade sous la pluie n'est jamais mauvaise, la joie y vient avec la peur. "

Mon sentiment au sujet de ce roman :
J'ai pris, depuis quelques temps, une fort mauvaise habitude : celle, dès qu'un livre est terminé, d'enchaîner sur le suivant, celui se trouvant tout en haut de ma pile (énorme), de manière assez boulimique, je le crains. Et cela sans prendre ce temps précieux de poser mes idées, sans rien écrire sur ma lecture achevée. Du coup, ne me reste, la plupart du temps, que le fil d'une histoire, le conte. 
Or, l'histoire seule n''est pas ce qui, à mon avis, fait l'essentiel d'un bon écrit. Par exemple, dans ce livre-ci (que j'ai achevé voilà plus d'un mois...), il n'y a pas vraiment d'histoire. Plutôt un genre de journal tenu par l'auteur, sur ces petits riens qui, mis bouts à bouts, font le fil d'une vie toute entière. Des ressentis. Des émotions. Des moments.
Christian Bobin est particulièrement expert dans ce genre d'exercices : ici, il passe (apparemment ?) (une amie me dit qu'il est heureux s'il a écrit une seule phrase dans sa journée. Donc tous ses enchaînements doivent être pensés... ?) du coq à l'âne, en ayant souvent l'air de s'égarer. Mais il explique aussi très bien que, pour lui, un bon texte est constellé de "mauvais passages" (ici, malgré le fouillis apparent, je ne les ai pas vraiment trouvés...), de ceux où il ne se passe pas grand chose, parfois même rien du tout, mais qui sont précisément là pour permettre au lecteur de se centrer sur le meilleur du récit. Sur le message essentiel. Le vecteur.
Je crois qu'il illustre là la vie dans son entier : celle de l'individu, pleine de creux et de pleins (les deux ensemble font une vie), mais aussi (cela n'engage que moi...), si j'ai bien compris les théories du monde quantique, celle où l'information passe en prenant le chemin du "vide" (pour les sceptiques, un lien franchement intéressant : http://www.canal-u.tv/video/cerimes/le_vide_quantique_source_d_energie_et_d_emerveillement.9347).
Poête ? Philiosophe ? Grande rêveur ? Visionnaire ? Bobin réveille de nombreux questionnements et ouvre beaucoup de portes. ..Et m'agace aussi, quelquefois... (parce que je le préfère romancier, même si je l'aime quand même (voui-voui, Monsieur Bobin, j'ose le dire : je vous aime), comme ici, "secoueur de neurones... ;)

Morceaux choisis :
"Lire pour se cultiver, c'est l'horreur. Lire pour rassembler son âme dans la perspective d'un nouvel élan, c'est la merveille. 
"
"Ne jamais exiger quoi que ce soit : attendre.
Ne jamais, à personne, rendre compte de ce que tu vis : rire
Ne jamais chercher une aide : attendre encore."
"Et c'est quoi,la fin d' un livre. C'est quand vous avez trouvé la nourriture qu'il vous fallait, à ce jour, à cette heure, à cette page."
"Ecrire... C'est affaire de silence plus que de musique. Mon vrai désir ce n'était pas d'écrire, c'était de me taire. M'asseoir sur le pas d'une porte et regarder ce qui vient, sans ajouter au grand bruissement du monde. Ce désir est un désir d'autiste. Entre le mot "autiste" et le mot "artiste", il n'y a qu'une lettre de différence, pas plus. "
"J'ai toujours été été sensible aux voix déportées par le vent, aux voix qui ne s'adressent pas à vous et vous amènent, un instant, quelques paroles banales, les paroles éternelles de chaque jour."
"Et puis, permettez-moi cette insolence, le miracle est que par endroits vous écriviez si mal : dans chacun de vos livres j'ai trouvé une zone d'ennui, un marais où l'histoire devenait brumeuse et où les phrases n'avançaient presque plus. J'ai bientôt compris que ces pertes étaient indispensables à l'éclat du livre, qu'elles étaient même une partie constituante de cet éclat, comme les broussailles font corps avec la clairière qu'elles protègent."
"Le monde va toujours vers le pire. Dès qu'on le laisse aller seul, le monde va vers la destruction du faible et du précieux en nous."
"La vie n'est jamais si forte que lorsqu'elle est empêchée dans une de ses voies. Elle file, limpide, par l'issue qui lui reste."
"Personne ne peut vivre une seconde sans espérer."

29 juin 2015

4 mains

Avec Sonya, on se retrouve de temps en temps de plus en plus souvent,
pour explorer, ensemble, les possibilités de la pâte polymère, 
en échangeant nos techniques.
Sonya aime imiter les matières naturelles (en ce moment, le bois)
(technique qu'elle maîtrise magnifiquement, je trouve !)

tandis que les azulejos m'inspirent.

Nos deux matières associées nous ont toutes les deux un peu destabilisées,
nous obligeant à sortir de nos habitudes.
On pourrait penser qu'à 4 mains on travaille plus vite, 
Pour nous, c'est plutôt l'inverse, semble-t-il...

Voici le résultat de nos échanges
(Je vous laisse deviner qui a fait quoi !)

Association Sonya-Anne

Bijoux 2544

Photos Juin 2015

***

Je vous encourage vivement à aller visiter sa page FlickR,
Sonya est incroyable de créativité.
Vous en jugerez par vous même...

27 juin 2015

dans l'infini

"Tout dit,
dans l'infini,
quelque chose à quelqu'un".

(une citation de Victor Hugo)

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Photo Juin 2015
Le lac de Monteynard,
avec l'envol d'un oiseau, et son ombre, sur la paroi de la montagne.
C'est minuscule, et c'est pourtant là que se trouve l'immensité...

11 juin 2015

dernière lecture : Le liseur du 6h27

de Jean-Paul Didierlaurent 

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5 etoiles

Présentation de l'éditeur :
Employé discret, Guylain Vignolles travaille au pilon, au service d'une redoutable broyeuse de livres invendus, la Zerstor 500. Il mène une existence maussade mais chaque matin en allant travailler, il lit aux passagers du RER de 6h27 les feuillets sauvés la veille des dents de fer de la machine ...
Dans des décors familiers transformés par la magie des personnages hauts en couleurs, voici un magnifique conte moderne, drôle, poétique et généreux : un de ces livres qu'on rencontre rarement.
"Peu importait le fond pour Guylain. Seul l'acte de lire revêtait de l'importance à ses yeux. Il débitait les textes avec une même application acharnée. Et à chaque fois, la magie opérait. Les mots en quittant ses lèvres emportaient avec eux un peu de cet écœurement qui l'étouffait à l'approche de l'usine."
Jean-Paul Didierlaurent vit dans les Vosges. Le Liseur du 6h27 est le premier roman de ce nouvelliste exceptionnel, lauréat à deux reprises du fameux Prix Hemingway.

Mon sentiment au sujet de ce roman :
Bon ben voilà… Je vais ajouter ma pierre à l’édifice des lecteurs enthousiasmés par ce roman. Pour moi, Colin et Chloé (L’écume des jours) ont bien du se rencontrer dans ce genre d’histoire : un monde hostile où la poésie se débat pour exister. D’ailleurs, depuis le début, j’ai le sentiment qu’ici est le point de départ de leur rencontre…
Mais ça, c’est mon côté rêveuse à l’imagination galopante. 
Autant dire que dans ce roman j’étais donc parfaitement dans mon univers, avec une mention spéciale pour la description des faïences de Julie, très poétique. Mais j’ai aussi adoré l’immersion de Guylain (non non : le héros de notre histoire ne se prénomme pas Colin…) dans l’univers des retraités, et faire la rencontre de son ami Yvon, grand amateur d'alexandrins et de théâtre classique. 
C’est léger, sans l’être vraiment, tendre et pourtant incisif, avec cette fantaisie particulière qui sait quelle corde faire vibrer dans mon âme de lectrice acharnée.

 

Morceaux choisis :
"Avoir pour confident un poisson rouge impliquait de ne rien attendre d'autre de lui que cette écoute passive et silencieuse, même s'il croyait parfois déceler dans le filet de bulles qui sortait de sa gueule un début de réponse à son questionnement"
"Comment voulez-vous que le monde tourne droit si n'importe qui se met à écrire".
"Pour l'avoir déjà vécu, il savait qu'il existait une énorme différence entre vivre seul et vivre seul  avec un poisson rouge".
"Ses silences étaient pleins. Guylain pouvait s'y glisser comme dans un bain tiède."
« Les gens n’attendent en général qu’une seule chose de vous : que vous leur renvoyiez l’image de ce qu’ils veulent que vous soyez. »
"Car, quoi que l'on puisse penser, rien n'est jamais figé dans la vie."
"J'ajouterais enfin que depuis quelques temps, j'ai découvert qu'il existait sur cette planète un être qui avait le pouvoir de faire paraître les couleurs plus vives, les choses moins graves, l'hiver moins rude, l'insupportable plus supportable, le beau plus beau, le laid moins laid, bref, de me rendre l'existence plus belle."

"J'aime ce moment particulier, quand la planète semble suspendre sa course, le temps pour elle de faire son choix entre la lumière du jour naissant et le noir de la nuit qui se meurt. Je me dis qu'un jour peut -être, la Terre ne va pas reprendre sa rotation et s'immobilisera à jamais tandis que la nuit et le jour camperont chacun sur leur position respective, nous plongeant dans une aube permanente. Je me dis alors que, baignées de cette lueur crépusculaire qui donne un ton pastel à toute chose, les guerres seront peut être moins moches, les famines moins insupportables, les paix plus durables (...)"

Un passage un peu long (il y avait longtemps !). Une histoire dans l'histoire. Il y a juste à se laisser porter...
"Je les connais par cœur mes faïences. Malgré l'assaut journalier des coups d'éponge et des détergents, beaucoup sont restées éclatantes comme au premier jour et ont su conserver intacte cette glaçure légèremnet laiteuse qui nappe leur terre cuite. A vrai dire, celles-là m'intéresent peu. Leur trop grand nombre a fait de leur perfection une banalité sans attrait. Non, mes attentions vont plutôt aux éclopées, aux fendillées, aux jaunies, aux ébréchées, à toutes celles que le temps a estropiées et qui donnent à l'endroit, outre ce petit cachet vieillot que j'ai fini par aimer, une touche d'imperfection qui étrangement me rassure. "C'est dans les cicatrices des gueules cassées que l'on peut lire les guerres, Julie, pas dans les photos des généraux engoncés dans leurs uniformes amidonnés et tout repassés de frais, m'a dit un jour ma tante tandis que toutes deux briquions les carreaux à grands coups de peau de chamois pour leur rendre leur lustre d'antan. Je me dis parfois que le bon sens de ma tante mériterait d'être enseigné en faculté. Mes gueules cassées à moi témoignent qu'ici comme ailleurs l'immortalité n'exite pas. Parmi tout ce petit monde d'esquintées, j'ai bien sûr mes préférées, comme celle situé en haut à gauche du troisième robinet et dont l'éclat manquant dessine une jolie étoile à cinq branches ou cette autre à la brillance à jamais disparue et dont l'aspect étrangement terne contraste avec la pureté étincelante de ses congénères du mur nord."
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