Canalblog
Editer l'article Suivre ce blog Administration + Créer mon blog
Publicité
Le bruit des vagues
7 avril 2016

dernière lecture : Les voyageurs de l'aube

de Henri Gougaud

418SLzM-1XL

4 etoiles

Présentation de l'éditeur :
Dans un modeste ermitage au coeur du désert égyptien, Nathan, un vieux Copte, attend la mort avec sérénité. Et c'est la vie frappe à sa porte : venus de Bagdad, d'Ispahan, de Constantinople, de Jérusalem, des visiteurs font halte chez lui, en attendant de poursuivre leur chemin à bord d'une caravane partie, elle, de Samarcande. Mais, tel un mirage, la caravane n'arrive pas... Durant dix jours, Adour, l'ancien joueur de luth arménien, Hilarion, le moine-soldat grec, Zahra, qui attend la naissance de son enfant, et Madjid, le serviteur en fuite, vont tour à tour raconter leur histoire et leurs tribulations.
Ce sont ces récits, pleins d'espoir, de terreur, de drames et de joies qui dessinent les arabesques à la fois insensées et lumineuses de notre propre condition humaine. Le talent de conteur d'Henri Gougaud donne à cette fresque d'un Orient disparu le charme d'un rêve et la sagesse d'une fable où l'amour, le temps, la vie, la mort, la fraternité, la religion se répondent comme par enchantement.

Mon sentiment au sujet de ce roman :
C'est terrible quand ces choses là arrivent. On ne sait plus comment ni pourquoi : comment on a déniché un tel texte et pourquoi il nous touche à ce point.
S'agit-il d'un roman ? D'un conte ? D'un essai philosophique ? Qu'importe... 
Ce texte, qui m'a d'emblée embarquée dans l'univers de "L'Alchimiste", de Paulo Cohelo, est une porte ouverte à la réflexion sur la juste place de l'homme sur cette terre. Ses errances, ses questionnements, ses attentes. Il nous embarque dans sa quête de vérité et d'amour. Sa quête du Grand Vrai. Existe-t-il ? Pour lequel d'entre nous ? Tous ?
Pourquoi non ?
Pourquoi sourire ?
Ne me dites pas que vous n'y avez jamais réfléchi ?
Ce livre fait un bien fou. Il réajuste la respiration et le souffle, il repose l'esprit et donne foi en l'humain. En l'humanité, donc.

Morceaux choisis :
"Cette maison me fait content d'être vivant. Jusqu'ici, j'ignorais pourquoi. Maintenant c'est bien, je sais."
"Tout compte fait, le néant serait reposant"
"Nous ignorons presque tout de nos existences, des fils qui nous tiennent debout, des gouffres où nous sommes poussés, des ailes, qui parfois nous portent".
"On oublie que l'imprévu est le plus puissant de nos maîtres et de tous, le moins évitable. Ainsi on se croit en enfer, et voilà que naît la lumière. On va tranquille sous le ciel, et soudain on ne sait plus quel diable bouleverse nos horizons."
(à un bébé encore dans le ventre de sa mère) : "Fais-moi confiance, écoutes, ce que je vais t'apprendre est sûr. Au delà du lieu de ténèbres, où tu ne vois ni haut, ni bas, où tu ne sens ni chaud ni froid, où tu n'as même pas conscience que sont un dehors, un dedans, se trouve un monde où tu vivras, et dans ce monde est un soleil, un clair de lune, des étoiles, de grandes villes, des jardins, des mers, des arbres, des montagnes, et des créatures semblables à celle que tu deviendras, parmi lesquels sont des rois, des forts et des faibles, des pauvres, des malades, des gens heureux."
"- (...) Je veux savoir, dit-elle
- Savoir ? Quoi donc ? (...)
- Si elle l'aime toujours autant.
- Bien sûr, dit Adour, Que crois-tu ? Ces deux-là ne sont qu'un seul arbre, mêmes racines, même sève, même feuillage, même vie."
" Il se plaît à aimer l'amour, celui qui niche dans les âmes loin de ces lieux décourageants où sans cesse on se fait la guerre à coups de vrai, de feu, de miroirs, d'apparence."
"Il suffit parfois de se taire et les réponses viennent seules, elles ne demandent que cela, mais les questions les effarouchent, elles parlent trop fort, elles remuent, elles ne désirent pas, elles veulent, elles ignorent que le silence est le berceau où se murmure tout ce qui vaut d'être entendu".
"Tous les enfants, même mal faits, sont d'incomparables cadeaux, du moins avant qu'ils ne se gâtent."
"Nous avons au fond de l'âme, quelque chose, une nostalgie, un souvenir d'inexistence, un parfum de maison sans murs, un pressentiment de présence, d'amour simple auprès d'un berceau, au temps où nous n'étions pas né, même pas logé dans un ventre. On peut ressentir ces bontés, mais rien ne sait vraiment les dire, sauf la musique, et quelquefois cette lumière jamais vue qui naît au dernier mot d'un conte, et qui nous laisse bouche bée."
"Quels chemins t'ont conduit ici, quels détours, quelles aventures ? J'aime écouter ta voix, elle me remue le coeur, elle charrie du sucre et du sel, du vent de sable, du ciel noir."
" Pouvoir secret de l'attention. Elle change le regard, l'objet, et la palpitation des sens."
 
Et puis, cette histoire dans l'histoire, de celles que j'affectionne particulièrement, et qui me touchent, mais qui peut-être n'émouvront jamais que moi... Ma foi, tant pis...
"C'était un jour de plein été dans le grand jardin buissonneux de mon grand-père menuisier et chanteur d'épopées anciennes. Nous étions cinq ou six enfants à nous tirailler la chemise, à lancer des cailloux précis aux nids de pies. Connaissez-vous le jeu où l'un va se cacher, où les autres partout le cherchent ? C'était moi, ce jour-là, que l'on devait trouver. J'avais repéré un abri dans le tronc moisi d'un vieux chêne. Je m'y fourrai dedans, jubilant, presque sûr qu'aucun n'aurait l'idée de venir farfouiller dans ce sombre manteau d'écorce. J'attendis, l'oreille aux aguets, un long moment, tout frémissant, joyeux d'abord comme un filou, puis perplexe, puis déconfit. Personne alentour, plus un diable. Je sortis de mon creux de bois. Où étaient-ils tous ? Envolés !  Ils avaient remué ça et là les buissons et battu l'herbe autour des arbres. Ils ne m'avaient pas déniché. Alors ils s'en étaient allés à des plaisirs plus ordinaires. Je les vis au bord de l'étang qui s'aspergeaient, piaillaient, riaient. Je me sentis soudain si seul qu'un sanglot me monta aux yeux. Je courus, tout désemparé, chercher refuge à l'atelier où mon grand-père travaillait. C'était un homme au cœur sensible. Sa voix quelquefois se brisait quand il me chantait des poèmes. Il me serra sur sa poitrine qui sentait si bon le bois neuf. Je lui comptai ma pauvre histoire. Il m'écouta, sécha mes larmes puis me dit, triste lui aussi :. "Mon petit, tu sais maintenant ce que ressent Dieu chez les hommes". Vous êtes vraiment, tous les deux, aussi parents que des jumeaux. Lui aussi a voulu jouer. Il a trouvé je ne sais où une magnifique cachette. On le cherche, de-ci de-là, on l'espère, puis on l'oublie, chacun retourne à ses paresses, à ses jeux de bric et de broc, et lui reste plus seul que toi qui as au moins un vieux grand-père pour te rafistoler le cœur."
Publicité
Publicité
Commentaires
G
Personnellement je déteste absolument le côté "gourou new age donneur de leçons" de Paulo Coelo, mais Gougaud c'est différent : c'est un conteur hors pair ! Je n'ai pas lu celui-ci, mais il passera sans doute un jour entre mes mains !
Répondre
Le bruit des vagues
Publicité
Newsletter
Mes livres sur Babelio.com
Derniers commentaires
Archives
Visiteurs
Depuis la création 438 358
Publicité