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Le bruit des vagues
17 octobre 2014

dernière lecture : Profanes

de Jeanne Benameur

41+8P0RoeCL

5 etoiles

Présentation de l'éditeur :
Ils sont quatre, ils ne se connaissent pas mais ils vont rythmer la vie du docteur Octave Lassalle qui les a soigneusement choisis comme on compose une équipe -- comme avant autour de la table d'opération, mais cette fois-ci, c'est sa propre peau qu'il sauve, sa propre sortie qu'il prépare. Ensemble, cette improbable communauté progressivement tissée de liens aussi puissants qu'inattendus, franchira un seuil, celui des blessures secrètes. 
Un hymne à la vie et un plaidoyer pour la seule foi qui vaille : celle de l'homme en l'homme.

 

Mon sentiment au sujet de ce roman :
Je n'en peux plus. J'ai envie de les dévorer très vite, ces mots, mais aussi de les déguster le plus délicatement possible, tant ils me semblent précieux. J'ai rarement ces sensations-là, en ouvrant un roman. Mais là, c'en est presque douloureux. Je viens de trouver un texte dont les mots résonnent violemment en moi. Tous les mots. Dès la première page. C'est terrible de bonheur, et le bonheur est une donnée tellement fugace que j'ai peur d'en diluer l'essence ne serait-ce qu'en essayant d'expliquer ce que j'ai ressenti ici.
Parce que mon dieu, quel roman magnifique ! Sélectionner quelques citations est pour moi une vraie torture ! Le livre entier est un génie d'écriture.
Comme une porte ouverte. Qui donne envie de connaître encore tellement de choses... C'est là que l'on se sent minuscule : plus l'on s'instruit (en lisant, en écoutant de la musique, en découvrant de nouveaux artistes), et plus l'on voit devant quel gouffre de connaissances on se présente. C'est à la fois étourdissant et excitant. Mais aussi effrayant... Je n'aurai jamais assez de temps.
L'histoire est tellement fluide... et pourtant percutante. Les personnages sont beaux, jusque dans leur âme.
Roman jubilatoire. Il faut le lire pour comprendre. Doucement, si possible (mais c'est impossible...). Le relire très vite, alors...

 

Avec ce roman, j'ai découvert pas mal de choses:
- l'univers photographique d'Alexandre Hollan ("Je suis ce que je vois" ...ah mais oui, de cela je suis certaine !)
- les portraits de Fayoum, dont j'avais entendu parler. Je suis aller voir un peu plus loin de quoi il en retourne... : http://jfbradu.free.fr/egypte/LA%20RELIGION/LE%20FAYOUM/LE%20FAYOUM.php3

Et puis, moi qui ai toujours voulu écrire des haikus, cela me donne encore davantage envie de m'y mettre. Il faudrait alors que quelqu'un m'apprenne... Il y a bien ce site http://www.haikunet.org/, qui donne beaucoup de clés, mais rien ne vaut le partage, je crois...

 

Morceaux choisis : (oh là là, pardon, j'ai essayé de limiter, mais les mots écrits dans ce roman sont si beaux que, même en me limitant, cela déborde de tous les côtés... Picorez, si cela vous semble trop long.)
"(...) ce qui a été est. A l'intérieur. Pour toujours. Pourquoi s'en priver ?"
"On ne peut donc jamais en sortir de cette possession qui empoissonne, dès qu'on s'attache ?"
"Quand on laisse la souffrance vous prendre trop longtemps, on finit par être paresseux de sa propre vie".
"La peur du désastre fait partie de l'aventure. On peut sauver ou ruiner toute une vie quand on prend le risque".
"Il n'y a aucune intention dans un paysage. Il n'y a aucune intention dans la ramure d'un arbre et ça, c'est un repos".
"(...) chacun observe l'autre et on ne sait jamais ce qui de nous sera retenu, à notre insu".
"Quelqu'un d'autre peut-être, invisible, derrière le rideau d'une fenêtre ou sur un balcon, une terrasse, regarde la même chose qu'elle, au même moment, ou bien a regardé, un jour, et elle aime partager ces choses impalpables. Elle se dit que la ville est faite de croisements invisibles. La peinture est là pour les révéler, c'est tout".
"Elle a toujours pensé que les mots détenaient une puissance qu'on ne voulait pas connaître vraiment. Les mots peuvent tout changer. Elle, elle s'est mise du côté muet de la parole, avec la peinture. Elle sait que c'est sa place. Mais elle n'ignore rien de la puissance des mots. Tout au fond d'elle".
"Il ouvre les yeux. Les étoiles au-dessus de sa tête sont mortes depuis longtemps. Pourtant, la beauté est là. Quand même. Bien sûr il y a un phénomène physique et des calculs précis qui permettent de savoir exactement comment la lumière se propage dans l'espace. Mais la beauté ? Ce que provoque en lui ce scintillement-là dans tout le noir, quel chiffre peut le mesurer ? C'est dans les mots qu'il faudrait chercher un passage. Dans le silence juste entre les mots justes. C'est là qu'il y aurait une prière. Peut-être. Il faudrait inventer".
"Elle pense ces drôles de choses qu'on pense parfois quand on prend le temps de s'arrêter dans une histoire, de la regarder d'en haut, comme un oiseau".
"Réunir, ce n'est pas juste faire asseoir des gens dans la même pièce, un jour. C'est plus subtil. Il faut qu'entre eux se tisse quelque chose de fort."
"Quand je n'ai plus de refuge, je vais dans les mots. J'ai toujours trouvé un abri, là. Un abri creusé par d'autres, que je ne connaîtrai jamais et qui ont oeuvré pour d'autres qu'ils ne connaîtront jamais. C'est rassurant, de penser ça. C'est peut-être la seule chose qui me rassure vraiment."

« Elle avait été émue par ce texte. Profondément. D’autant plus que l’émotion était inattendue ».
« Tant que la politesse a le dessus, on ne peut rien savoir vraiment des gens. C’est toujours au moment où ça se fendille qu’on sait exactement de quoi le bois est fait ».
« L’amour ne rassure de rien, n’empêche rien. Aimer ne donne aucune protection ».
« Je voudrais tant qu’il y ait un grand élan qui m’emporte, quelque chose contre quoi je ne pourrais même pas lutter. Je ne me poserais aucune question. Ce serait plus fort que tout ».
"Un peu plus tôt, un peu plus tard, peu importe. Ce qui compte, c'est qu'aucun vivant n'ignore que sa vie aura une fin."
« Les souvenirs, c’est dans les vertèbres, qu’ils s’installent. Ils vous courbent le dos (…) ».
« Il aimerait s’arrêter là, s’allonger sur la terre et fermer les yeux, pénétré de ce parfum, s’endormir ».
"Dans leurs regards, la gravité de ceux qui ont appris que l'amour ne protège de rien. Qu'il sert juste à prendre tous les risques. Et qu'on est toujours aussi vulnérable".
"C'est la première fois qu'elle se formule les choses de cette façon : elle ne pense pas Je suis seule. Elle pense Je suis libre".
"Les mots de l'amour il faudrait se contenter de les dire au-dessus de l'eau qui coule, dans le vent au bord de la mer. Qu'ils soient portés loin. L'amour on ne devrait jamais l'enfermer, n dans les bouches, ni dans les coeurs. C'est trop vaste".
"Le vieil homme, debout, s'appuie sur sa canne. Marc pense à un arbre. Les arbres qui ont l'air si vieux et qui reverdissent, quand même, chaque printemps, obstinément."
"On a beau être un profane, la foi, elle va se loger où elle peut. Pourquoi pas dans les mots ?"
« Une seule année, parfois, peut nourrir toute une existence ».
"Il se dit qu'œuvrer sauve de tout. Se concentrer totalement. Evacuer de sa tête de son coeur tout ce qui gêne. Etre entièrement à ce qu'on fait. Et c'est tout. La belle expression.? Oui, c'est vraiment "tout". Alors quelque chose s'ouvre".
« Elle se dit que (…) si chaque jour, elle arrivait à faire une chose, une seule, qui soit belle, elle serait sauvée. »
« Comment pénétrer dans ce qui ne lui appartient pas, ne lui appartiendra jamais ? Comment se donner le droit d’entrer dans l’histoire des autres ? Est ce qu’il suffit de les aimer ? »
"Est-ce qu'on choisit les liens qui vont se tisser lorsqu'on va travailler dans un bureau, une usine, une école ? On va se parler, forcément, et même finir par deviner à la façon de se dire bonjour le matin comment chacun va."
"La liberté est terrible. Si petite pour chacun. La si petite liberté humaine. Et ce désir parfois de l’enfoncer sous la terre. Parce que trop. Si petite, mais déjà trop".
« Rien que cette sensation aiguë de connaître quelqu’un par tout ce qu’il émet à son insu, animal, c’était un bonheur. »

 

***

 

Les 4 haikus, dans le romans, qui sont ceux destinés aux 4 "gardiens" :

"Nu sur un cheval
nu sous la pluie
tombant à verse"

pour Marc,

 

"Premier lever de soleil
Il y a un nuage
Comme un nuage dans un tableau"

pour Hélène,

 

"L'enfant qui l'imite
est plus merveilleux
que le vrai cormoran"

pour Béatrice,

 

"Souffle le vent d'automne
mais les bogues des chataîgnes
sont vertes"

pour Yolande.

 

Mon préféré ? Celui destiné à Béatrice. Visuel et aérien.
Ces haïkus sont extraits de "Haïku" (Fayard, coll "L'Espace intérieur").
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Commentaires
J
BOU DIOU!!!!<br /> <br /> c'est d'abord ton post que je vais relire et déguster !!!<br /> <br /> Puis cliquer sur les liens : je ne sais absolument pas ce qu'est un Haïku...<br /> <br /> Puis je retiens cette phrase qui ( hélas ) colle à moi : "Quand on laisse la souffrance vous prendre trop longtemps, on finit par être paresseux de sa propre vie".<br /> <br /> Je m'en vais méditer ...<br /> <br /> Puis acheter ce livre et le déguster si je peux , car moi aussi je lis parfois un livre " douloureusement " en voyant inexorablement approcher la fin et pourtant on ne peut pas ne pas continuer !!!!<br /> <br /> Ne poste pas trop vite derrière celui-ci , laisse moi le temps de...prendre le temps !!!<br /> <br /> et pourtant , comme disait Michel Fugain " même en 100 ans , je n'aurai pas le temps ... de tout faire " !<br /> <br /> ZUT , alors !<br /> <br /> Merci !!!<br /> <br /> JINe
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M
merci, ca me donne très envie de le lire !
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