dernière lecture : Plonger
Présentation de l'éditeur :
Ils l’ont retrouvée comme ça. Nue et morte. Sur la plage d’un pays arabe. Avec le sel qui faisait des cristaux sur sa peau. Une provocation. Une invocation. À écrire ce livre, pour toi, mon fils. ».
Un homme enquête sur la femme qu’il a passionnément aimée. Elle est partie il y a plusieurs mois, pour une destination inconnue, le laissant seul avec leur petit garçon. Quand le roman s’ouvre, on l’appelle pour lui dire qu’on l’a retrouvée morte, sur une plage, près des vagues, vraisemblablement noyée, dans un pays lointain au paysage minéral qui pourrait être l’Arabie. Elle était artiste, elle s’appelait Paz. Elle était solaire, inquiète, incroyablement douée. Elle étouffait en Europe. Pour son fils, à qui il doit la vérité sur sa mère, il remonte le fil de leur amour - leur rencontre, les débuts puis l’ascension de Paz dans le monde de l’art, la naissance de l’enfant – et essaie d’élucider les raisons qui ont précipité sa fin.
Grand Prix du Roman de l'Académie Française 2013
Mon sentiment au sujet de ce roman :
Je crois que je vais avoir du mal à exprimer mon sentiment... Je suis toute tourneboulée, et je crois qu'il faut que je remette doucement mes idées en place.
Vous dire que j'ai avancé vers l'adoration totale, alors qu'au départ ma lecture était très mitigée, voire très critique, distante. Aucune envie de m'imprégner, de poursuivre : trop de clichés, d'étalage de connaissances dans tous les domaines, y compris linguistique : on finit par se sentir ridiculement inculte, c'est vexant, à la fin !
Sauf que "Monsieur" se fait durement remettre à sa place par les gens, par la vie, et il en prend même plein la figure. Tellement violemment qu'il en perd sa superbe et devient humain, fragile, enfin accessible, aurais-je envie de dire. Parce que vient alors le moment où il devient possible d'aborder les choses simples, un monde où l'instant compte, où l'on ne cesse de s'émerveiller… L'auteur, par un tour de passe passe, nous hypnotise jusqu'à nous donner cette impression d'être au cœur des choses. Voir souffrir César nous désole et nous touche, profondément. Le voir aimer jusqu'à ce point de non-retour est très émouvant. Très dur à contempler, sinon impuissants...
J'ai aussi aimé ce roman qui aborde, l'air de rien, de nombreuses préoccupations contemporaines, qui met le doigt sur l'art, sur la fragilité de la vie et de l'amour. Sur la vie sous-marine qui nous propulse dans un autre monde, cela me donnerait presque envie d'y retourner faire un tour, dans ce monde subaquatique merveilleux, même si j'ai une peur viscérale de l'eau...
Plonger, quel titre inspiré !
Parce que oui : ici on plonge, littéralement, vers un univers qu'il ne sera plus jamais possible d'oublier.
J'ai bien aimé l'analyse de Leiloona Bricabook, qui aborde sa lecture avec un autre regard (également enthousiaste).
Morceaux choisis :
"Dans la vie, n'attends pas que le destin te prenne en charge. Le destin te regarde, il sera séduit s'il te voit entreprendre, il sera bon compagnon et te filera un coup de main, mais c'est à toi de faire le premier pas. Même si c'est absurde."
"C'est fou ce que l'argument professionnel rassure les gens quand leur conscience leur dit que ce qu'ils ont fait n'est pas bien. C'est fou ce que ça les empêche de se rebeller, aussi..."
"La plupart des gens, autour de moi, portaient des casques. Certes, pour la musique, mais quand même, des casques, comme s'il fallait se retrancher du monde pour pouvoir le supporter."
"Les réseaux sociaux nous serinaient le mot "partage", nous faisant croire aux mirages d'un monde où tout serait mis en commun, alors que c'était tout le contraire".
"Il semble que l'être humain s'épuise aux yeux de l'autre comme s'épuisent les gisements d'or. On ne trouve plus d'or en l'autre, alors on le quitte".
"On méprise le mot "spécialité". Mais tant que ce mot existera, cela suffira à nous faire comprendre que le monde est encore divers".
"Quelle est son histoire ?" demanda ta mère, que j'aimais aussi pour ça : elle mettait de l'humain dans tout. Chaque homme, chaque femme avait une histoire, un drame, un bonheur qui expliquait sa façon d'être".
"Un artiste n'a pas à parler. L'oeuvre parle d'elle-même".
"Je ne crois pas, en effet, que notre époque puisse se raconter sous la forme d'un roman. Il faut un minimum de narration, et ce monde-ci, toujours entrecoupé par la réception d'un SMS, d'un mail, ne raconte plus grand chose dans la longueur. La seule chose qui y soit continue, c'est l'interruption".
"Terrible quand même, cette non-réciprocité de l'émotion, ces coups de foudre individuels".
"Notre corps ne s'arrête pas à notre corps".
"On ne décide pas du sommeil. Il vient, ou il ne vient pas".
"[...] dit qu'il poursuit ce moment de notre vie où l'on n'a pas de doutes, où l'on ne juge pas, où il y a juste à accepter le monde, à vivre simplement les choses comme elles sont. Il a même une définition de l'art que je trouve très belle : "L'art est cette quête permanente de l'effacement de l'anxiété".