surprise...
quelqu'un m'appelle
dernière lecture : Avec vue sur la mer
de Didier Decoin
Présentation :
Lorsqu'il était enfant, Didier Decoin a passé des vacances dans la Hague, au Nord du Cotentin. Il est tombé amoureux de cette région et a passé des années à y rechercher une maison. Il nous raconte joliment ses mésaventures immobilières, les péripéties inévitables liées aux travaux, les tempêtes, son jardin, les petits bonheurs du voisinage et des nourritures terrestres qu'offre ce pays normand battu par la mer et le vent.
Mon sentiment au sujet de ce roman :
Un vrai plaisir. Pourtant, ce n'est rien de spécial. Seulement l'achat d'une maison secondaire. Racontée par un véritable conteur, que dis-je, un véritable ensorceleur, avec quelques passages succulents (l'envolée du toit du voisin), d'autres où je me retrouve totalement (sortir par grand-mauvais-temps écouter la mer mugir en choeur avec le vent), d'autres encore qui me rappellent quelques bons moments (la lumière du phare, dans la chambre, la nuit, à Roscoff...).
J'adorerais tellement ça : une maison avec vue sur la mer, juste pour mettre le nez contre la vitre les jours de grosse tempête !
Morceaux choisis :
« Je soupçonne Dieu d'être de la famille des phares. »
« Comme l'amour, la vue sur la mer est quelque chose qui n'a rien en soi d'exceptionnel, qui est connu et partagé par des millions de gens. Pourtant, quand cela vous échoit, vous ne pouvez vous défendre de l'impression que rien au monde n'est comparable à votre amour ni à votre vue sur la mer. »
« En matière de jardinage, c'est l'oeil qui fait le plus gros du travail. »
« J’ai fait ce livre pour dire que je n’habite pas une maison mais que je suis habité par elle… »
Et puis, ce passage plus long, qui me plaît particulièrement :
« Je n'ai jamais vu la mer Rouge, mais je sais bien qu'elle n'est pas rouge. Pas plus, d'ailleurs, que la mer Noire n'est noire. La mer n'est rouge, vraiment rouge, qu'à (...) une certaine heure, brièvement, quand le soleil couchant, comme un tube de peinture que l'artiste écrase, dégorge brusquement une coulée de sa pâte brillante et fluide, d'un incarnat si ardent, si dévorant que les plus vives couleurs de la palette semblent tout à coup d'une tristesse de suie.
La "rougie" de la mer se propage d'ouest en est, courant comme un incendie. Portée par les vagues, elle atteint le rivage, submerge l'ourlet de la plage, s'étale sur les galets en lave incandescente, embrase les lacets de la route, escalade les falaises où elle empourpre les bruyères, l'ocre brune des fougères, le nankin des ajoncs. Le rouge investit tout, faisant du moindre gravier un rubis, transformant les bouquets d'ombelles en forêts de petits érables qui flambent dans la gloire fugitive de quelques minutes d'été indien à l'échelle d'un talus ou d'un fossé.
J'ai même cru voir, perché sur un rocher où il faisait sécher ses ailes, un cormoran virer du noir à l'écarlate. »
drôle de coquillage
"On dirait que le bruit de la mer
est l'enveloppe qui contient tout le reste,
les couleurs, les odeurs.
Si tu regardes longuement le ciel et la mer,
tu finis par croire que ce bruit,
tu le vois."
une citation de Philippe Labro
barrette en pâte polymère et rocailles
Une création récente
qui ne serait pas encore visible en boutique vous plaît ?
N'hésitez pas à me contacter
(photo été 2010, dans les Côtes d'Armor)
dernière lecture : Les jours fragiles
de Philippe Besson
Présentation :
23 juillet 1891 : Arthur Rimbaud revient à Charleville chez sa mère. Amputé d'une jambe, il est à l'agonie et c'est sa sœur Isabelle qui couche ses impressions dans un journal intime fictif, prétexte au roman de Philippe Besson.
Rimbaud revient à l'endroit qu'il a toujours voulu fuir, d'abord pour écrire puis pour faire fortune en Afrique.
Isabelle le soigne et se fait violence pour occulter les horreurs qu'Arthur ne cesse de lui raconter et que ses chastes oreilles de " vieille fille " ne sauraient entendre s'il n'était pas condamné. Leur mère est présente, mais impitoyable, indéchiffrable, alors qu'elle est probablement l'une des clés de l'existence brisée d'Arthur.
Au bout de trente jours, il redescend à Marseille avec l'idée de repartir en Afrique retrouver la vie et le dernier amour qu'il a laissé là-bas un jeune homme dénommé Djami. Il y mourra dans des souffrances inouïes, mais croyant encore embarquer le lendemain.
Dans ce huis-clos entre un frère et une sœur qui ne peuvent pas se comprendre tant la distance entre leurs vie est disproportionnée : Arthur est athée, homosexuel, drogué, Isabelle, pieuse, vierge, travailleuse, le courant passe pourtant. Car Isabelle pressent que son frère est un génie, mais qu'en même temps il ne peut " entrer souillé dans l'histoire ". De son côté Arthur sait confusément qu'il va mourir même s'il lutte jusqu'au bout pour fuir à nouveau.
Philippe Besson s'est glissé dans le personnage d'Isabelle pour affronter Rimbaud du côté de l'intime et non du poète. Il parle à peine de sa poésie puisqu'elle même n'en savait presque rien, mais ce qu'il en dit suffit à faire revivre le génie de Rimbaud avec la grâce et la retenue, qu'on lui connaissait dans ses précédents romans.
De la même façon qu'il éclaire, en ne parlant que des six derniers mois du poète, sa vie entière faite de mystères, relevant de l'indicible, car bien décidé à comprendre Arthur Rimbaud qui le fascine depuis toujours, il a réussi par petites touches, à travers des non-dits, des hypothèses à peine esquissées, à pressentir, avancer dans la connaissance du personnage. Donner un visage humain à un mythe adoré ou détesté dans un roman ayant la grâce.
Mon sentiment au sujet de ce roman :
ça m'a fait plaisir, au travers de cette lecture, de découvrir la vie d'Arthur Rimbaud. De connaître l'Homme qu'il fût.
Mais voilà tout.
Et puis j'ai regardé, à la fin du roman : pas de poème non plus, dommage.. Le dormeur du val, Le bateau ivre, autant de textes que j'aurais aimé parcourir en parallèle de ma lecture.
Déception (douce), donc, pour moi.
Pourtant, une belle critique, sur le site evene.fr
Pourtant un auteur passionné, qui sait parler de son roman avec fougue.
Morceaux choisis :
Il faut arranger nos souvenirs. Sans ça, la vie n'est pas supportable.
Libre. Le tragique de ce seul mot.
Le mutisme n'exige pas d'effort. C'est parler qui est difficile.
Les lieux sont aussi des liens. Et ils sont notre mémoire.