Morceaux choisis :
"Le poète est un autiste qui parle. L'autiste, c'est un homme nu dans une pièce viede. Il n'éclaire rien parce qu'il retient sa lumière, mais en écrivant, il retourne sa peau, et l'envers de cette peau est chamarrée de couleurs splendides. L'autisme est un soleil inversé : ses rayons sont dirigés vers l'intérieur".
"L'empathie c'est, à la vitesse de l'éclair, sentir ce que l'autre sent et savoir qu'on ne se trompe pas, comme si le coeur bondissait de la poitrine pour se loger dans la poitrine de l'autre".
"La bonté, c'est simple : par définition on n'en a pas. Elle n'a pas de place dans le monde. Donc, quand elle est là c'est toujours un miracle."
"La vie des livres et des gens est très personnelle. On ne peut pas amener quelqu'un à une lecture en lui disant : "Lis, tu verras, c'est magnifique", ni à un amitié en lui disant "tu devrais fréquenter untel, c'et quelqu'un de formidable". ça ne marche jamais comme ça. Il faut trouver soi-même."
"Il y aura toujours quelque chose qui me manquera parce que je sais lire : je ne verrai plus jamais le monde comme le verrait un illettré."
L'improvisation, c'est beau. C'est comme attraper l'éternel par les cheveux. On prend le ciel et on le coud à la terre."
"Ce qui est bouleversant, c'est qu'un enfant va demander du secours à un ours en peluche, qu'un milliardaire va emporter avec lui à l'hôpital pour mourir un objet misérable qui lui apportera un réconfort, parce qu'il lui a été offert par quelqu'un de cher. Dans les moments critiques, les valeurs se renversent"
"Le coeur, c'est une intelligence qui peut venir même aux imbéciles"
Un bel extrait :
Aimer quelqu'un, c'est le lire. C'est savoir lire toutes les phrases qui sont dans le coeur de l'autre, et en lisant le délivrer. C'est déplier son coeur comme un parchemin et le lire à haute voix, comme si chacun était à lui-même un livre écrit dans une langue étrangère. Il y a plus de texte écrit sur un visage que dans un volume de la Pléïade et, quand je regarde un visage, j'essaie de tout lire, même les notes en bas de page. Je pénètre dans les visages comme on s'enfonce dans un brouillard, jusqu'à ce que le paysage s'éclaire dans ses moindres détails. Nos propres actes nous restent indéchiffrables; C'est peut-être pourquoi les enfants aiment tant qu'on leur raconte sans fin tel épisode de leur enfance. Lire ainsi l'autre, c'est favoriser sa respiration, c'est-à-dire le faire exister. Peut-être que les fous sont des gens que personne n'a jamais lus, rendus furieux de contenir des phrases qu'aucun regard n'a jamais parcourues. Ils sont comme des livres fermés. Une mère lit dans les yeux de son enfant avant même qu'il sache s'exprimer. Il suffit d'avoir été regardé par un nouveau-né pour savoir que le petit d'homme sait tout de suite lire. Il est même comme les grands lecteurs : il dévore le visage de l'autre. On lit en quelqu'un comme dans un livre, et ce livre s'éclaire d'être lu et vient nous éclairer en retour, comme ce que fait pour un lecteur une très belle page d'un livre rare. Quand un livre n'est pas lu, c'est comme s'il n'avait jamais existé. Ce qui peut se passer de plus terrible entre deux personnes qui s'aiment, c'est que l'une des deux pense qu'elle a tout lu de l'autre et s'éloigne, d'autant qu'en lisant on écrit au fur et à mesure et dont les phrases peuvent s'enrichir avec le temps. Le coeur n'est achevé et fait que quand il est fracturé par la mort. Jusqu'au dernier moment le contenu du livre peut être changé. On n'a pas la pleine lecture de ce qu'on lit tant que l'autre est vivant. Dieu serait le seul lecteur parfait, celui qui donne à cette lecture tout son sens. Mais la plupart du temps, la lecture de l'autre reste très superficielle et on ne se parle pas vraiment. Peut-être que chacun de nous est comme une maison avec beaucoup de fenêtres. On peut appeler de l'extérieur et une fenêtre ou deux vont s'éclairer mais pas toutes. Et parfois, exceptionnellement, on va frapper partout et ça va s'éclairer partout, mais ça, c'est extrêmement rare. Quand la vérité éclaire partout, c'est l'amour.